AUSCHWITZ-BIRKENAU・RAYMOND DEPARDON

AUSCHWITZ-BIRKENAU・RAYMOND DEPARDON

Le silence pour mémoire

En 1979, pendant deux semaines, le photographe et réalisateur Raymond Depardon réalise une série de photographies en noir et blanc sur le site d’Auschwitz-Birkenau. Ces images, une commande du magazine Paris Match, ont été publiées depuis dans plusieurs magazines internationaux.

Depuis mai 2025, le Mémorial de la Shoah accueille une exposition bouleversante : Auschwitz-Birkenau vu par Raymond Depardon. Connu pour son regard humaniste et son approche pudique du réel, le photographe et cinéaste français livre ici une série d’images d’une force silencieuse, captées en 2023 sur le site du plus grand camp d’extermination nazi.

Ce n’est pas la première fois qu’un photographe arpente Auschwitz-Birkenau, mais Raymond Depardon y apporte quelque chose d’unique : un regard qui refuse le spectaculaire, une distance respectueuse, une contemplation grave. Ses clichés, en noir et blanc, sans effets, sans mise en scène, témoignent d’une sobriété extrême. Loin de figer la douleur dans des stéréotypes visuels, il capte l’absence, le vide, les traces encore visibles d’un passé qui ne passe pas.

Dans cette série photographique, Raymond Depardon n’a pas cherché à « documenter » l’horreur. Pas de barbelés dramatisés ni de zooms sur les objets emblématiques. Il propose plutôt une déambulation silencieuse, où chaque image laisse place à la réflexion du visiteur. L’architecture abandonnée des lieux — les baraques, les rails, les tours de garde — devient ici un théâtre figé, où le silence raconte plus que les mots.

Le parcours de l’exposition, scénographié avec sobriété, accompagne le visiteur dans une immersion méditative. Les photographies sont ponctuées de textes choisis — extraits de témoignages, citations de Primo Levi, de Charlotte Delbo ou de rescapés anonymes — qui résonnent avec les images sans jamais les surcharger. C’est cette interaction entre les mots et le regard de Raymond Depardon qui donne à l’exposition toute sa profondeur.

Raymond Depardon, qui a toujours photographié les marges, les silences, les lieux où le regard se perd, trouve ici un territoire où son langage visuel prend une dimension quasi spirituelle. Il ne s’agit pas de comprendre Auschwitz, tâche impossible, mais de ressentir, d’approcher — avec humilité — l’indicible.

L’exposition s’inscrit aussi dans une démarche mémorielle forte, à l’heure où les derniers survivants disparaissent et où le devoir de transmission devient une urgence. En confiant cette mission à un photographe dont l’œuvre est marquée par la pudeur, le Mémorial de la Shoah fait le choix d’une approche sensible et durable. Celle qui laisse une empreinte dans la mémoire sans imposer un discours.

Exposition à découvrir jusqu’au 9 novembre -25

Mémorial de la Shoah・17. rue Geoffroy–l’Asnier 75004 Paris

www.memorialdelashoah.org

 

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