Aucun artiste avant Caspar David Friedrich n’avait posé de façon aussi poignante la question de la place de l’homme dans la nature et dans l’univers.
Acteur majeur de la peinture romantique allemande du XIXe siècle, tout en observant le monde empirique de façon fidèle, il lui donna une aura religieuse, croisant les catégories de l’espace et du temps.
Les paysages de Friedrich, d’une haute spiritualité et d’une si riche sensibilité, furent appréciés du public dès les débuts du xixe s. ; le Retable de Tetschen, cependant, et le Moine au bord de la mer rencontrèrent une vive opposition. La notoriété du peintre atteignit son apogée en 1810, lorsque la maison de Prusse fit l’acquisition de certaines de ses œuvres.
Chez Friedrich, la conception de la nature n’est soumise ni à la description littérale ni à l’idéalisation de la réalité vivante. Les motifs naturalistes sont considérés comme les hiéroglyphes d’une révélation divine. Un certain nombre d’éléments (la ruine, l’arbre, la roche brisée) transfigurent le paysage et lui donnent une portée symbolique. Ils relèvent peu du répertoire traditionnel.
La prédilection de l’artiste pour les scènes de lever ou de tombée du jour, de forêts envahies par la brume montre une fascination pour les thèmes du dévoilement et de la révélation. Les formes qui émergent de ruines fictives dans les brumes épaisses manifestent une réalité autre : l’avènement d’une humanité nouvelle au milieu des débris d’un univers ancien.
Le paysage offre souvent un premier plan plongé dans les ténèbres : des figures de dos, fréquentes dans les tableaux de Friedrich, contribuent à inclure le spectateur dans l’univers du tableau : promeneur un instant arrêté dans son errance, il contemple et cherche une nouvelle image du monde. La tension permanente entre réalisme et poésie semble parfois faire éclater l’image même.
La monographie de Werner Hofmann, devenue une référence, comprend un essai historico-philosophique auquel se mêle une analyse méticuleuse des tableaux. Les documents, lettres et écrits proposés en annexes éclairent la vie et la personnalité de Friedrich ainsi que son œuvre sublime. Werner Hofmann tâche également d’élucider d’autres aspects de l’œuvre friedrichienne, moins connus que ses paysages : sa vision de l’environnement privé et public de l’époque, les rapports entre l’homme et la femme, la femme comme être autonome dans la société.
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