Yasunari KAWABATA・

Yasunari KAWABATA・

Connu pour son imagerie radieuse et son pathos brumeux, l’auteur Yasunari Kawabata est un géant littéraire au panthéon des écrivains japonais. Premier auteur du pays à recevoir le prix Nobel de littérature en 1968, ses œuvres sont encore largement lues aujourd’hui.

Aujourd’hui, une œuvre de Kawabata qui n’avait jamais été traduite est disponible en anglais. L’arc-en-ciel – qui a été publié pour la première fois au Japon en 1951 – dépeint une famille complexe hantée par les péchés du passé. Le riche architecte Mizuhara a eu trois amours dans sa vie – et une fille de chacune d’elles.

L’histoire, qui se déroule quelques années après la Seconde Guerre mondiale, se concentre sur deux d’entre elles : Asako, la benjamine idéaliste, et Momoko, l’aînée traumatisée et en proie au chagrin, dont le premier amour est mort à la guerre.

Known for his radiant imagery and hazy pathos, author Yasunari Kawabata is a literary giant in the pantheon of Japanese writers. The country’s first author to win the Nobel Prize for literature in 1968, his works are still widely read today.

Now, a previously untranslated work by Kawabata is available in English. “The Rainbow,” which was first released in Japan in 1951, depicts a complicated family haunted by past sins. The wealthy architect Mizuhara has had three loves in his life — and a daughter from each. The story, set a few years after World War II, focuses on two of them: Asako, the girlishly idealistic youngest sibling, and Momoko, the grief-stricken and traumatized eldest whose first love died in the war.

Kawabata explore l’enchevêtrement des liens de parenté, en examinant les relations de ses personnages avec leurs parents, leurs enfants, leurs frères et sœurs et les membres de la famille de leurs amants.

La majeure partie du roman est consacrée aux conversations entre les personnages, qui réfléchissent et s’interrogent sur les jours passés. Ils semblent figés dans le temps – même les conflits furieux de Momoko avec son petit ami actuel ne font guère d’impression par rapport au passé lointain. Ce regard nostalgique rigide n’est peut-être rien d’autre que le sentiment de perte de Kawabata, qui a vu disparaître le « vieux » Japon qu’il avait connu, suite à la défaite du Japon pendant la Seconde Guerre mondiale et à l’occupation subséquente par les États-Unis. Une lecture plus optimiste est que Kawabata suggère qu’il n’est jamais trop tard pour guérir, tant que nous faisons face à notre douleur au lieu de la fuir.

Kawabata explores a tangled web of kinship, casting his eye over his characters’ relationships with parents, children, siblings and family members of lovers.

Most of the novel is devoted to conversations between characters as they reflect and agonize over bygone days. They seem to be stuck in time — even Momoko’s furious clashes with her current boyfriend hardly make an impression compared to the distant past. This rigid nostalgic gaze is perhaps nothing more than Kawabata’s sense of loss as the “old” Japan he once knew vanished, due to Japan’s WWII defeat and subsequent occupation by the United States. A more optimistic reading is that Kawabata suggests it is never too late to heal, so long as we face our pain rather than run away.

Le traducteur Haydn Trowell embrasse le monde sensible de l’art de Kawabata avec un anglais teinté d’archaïsmes, permettant aux lecteurs de se plonger dans l’art et la culture japonaise. Quand il n’y a pas de conversation dramatique dans « L’arc-en-ciel », il y a plutôt une description vivante : Kawabata souligne les sentiments de ses personnages à l’aide d’objets et de symboles de la nature. Les mois et les saisons s’écoulent dans des chapitres chronologiques, chaque saison étant le théâtre d’un drame pour les personnages ; les fleurs, les jardins et les œuvres d’art servent de toile de fond symbolique.

Le résultat est une structure formaliste qui rappelle le rythme régulier des haïkus et des peintures à l’encre. Kawabata met en scène la rencontre fatidique d’Asako avec un arc-en-ciel hivernal inattendu, Momoko se disputant avec son jeune petit ami au bord du lac d’hiver glacé de Hakone, les retrouvailles douloureuses de Mizuhara avec un ancien amant au milieu des cerisiers en fleurs éphémères de Kyoto, deux jeunes gens pris entre le passé et le présent qui errent dans des jardins zen. Les personnages discutent même fréquemment de leur environnement, comme lorsqu’Asako compare un pont dans le jardin zen au pont entre les âmes des amants.

Translator Haydn Trowell embraces Kawabata’s sensitive world of art with English tinged with archaisms, allowing readers to dip their toes into Japanese high art and culture. When there isn’t a dramatic conversation in “The Rainbow,” there is instead a vivid description: Kawabata underscores his characters’ feelings with objects and symbols of nature. Months and seasons pass by in chronological chapters, with each season setting the stage for character drama; flowers, gardens and works of art serve as a symbolic backdrop.

The result is a formalist structure that recalls the steady rhythm of haiku and ink-wash paintings. Kawabata stages Asako’s fateful opening encounter with an unexpected winter rainbow; Momoko fighting with her younger boyfriend atop Hakone’s icy winter lake; Mizuhara’s painful reunion with a past lover amid the fleeting cherry blossoms of Kyoto; two young people caught between past and present wandering Zen gardens. The characters even frequently discuss these surroundings, such as when Asako compares a bridge in the Zen garden to the bridge between lovers’ souls.

Du point de vue de 2023, c’est un plaisir d’accorder une telle attention à la disposition des pierres dans un jardin ou aux types de fleurs qui s’épanouissent – surtout lorsque leur couleur révèle des vérités cachées sur le cœur humain.

Parfois, cependant, « The Rainbow » semble dépassé dans sa pathologisation sexuelle du milieu du siècle dernier, le traumatisme de Momoko étant décrit comme résultant de sa poursuite et de son tourment des hommes gays efféminés. En rendant les voix des personnages aussi rigides que formelles, la traduction de Trowell les place dans un domaine psychologique éloigné du nôtre. Avec un tel fossé, il appartiendra à chaque lecteur de déterminer s’il ressent quelque chose de pertinent dans « The Rainbow » ou s’il s’agit simplement d’une belle relique d’une autre époque.

From the vantage point of 2023, it is a delight to pay such close attention to the arrangement of stones in a garden, or to the types of flowers in bloom — especially when their color reveals hidden truths of the human heart.

At times, however, “The Rainbow” feels outdated in its midcentury sexual pathologizing, with Momoko’s trauma described as resulting in her pursuit and tormenting of effeminate gay men. By rendering the characters’ voices as stiffly formal, Trowell’s translation places them in a psychological realm far from our own. With such a gulf, it will be up to each reader as to whether they feel something relevant in “The Rainbow,” or if it is simply a beautiful relic of another age.

 

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