Le terroir des hautes terres de Yamanashi
Avec son cadre quasi idyllique et sa cuisine créative et hyperlocale, Terroir Ai to Ibukuro réunit toutes les conditions pour être le restaurant de destination idéal.
Il semble isolé, mais il est facilement accessible depuis le centre de Tokyo. Il n’accueille que de petits groupes, mais il n’a rien d’exclusif. Il occupe un coin d’une vieille maison remarquable construite il y a près de deux siècles.
With its near-idyllic setting and creative, hyper-local cuisine, Terroir Ai to Ibukuro ticks just about all the boxes you can think of as the ideal destination restaurant.
It feels remote, but is easily accessible from central Tokyo. It only caters to small groups, and yet it feels anything but exclusive. And it occupies a corner of a remarkable old house that was built close to two centuries ago.
Une destination de choix
Par beau temps, surtout en hiver, vous pouvez vous attendre à ce que le sommet emblématique du mont Fuji soit visible pendant au moins la moitié des quelque deux heures que dure le trajet de Tokyo vers les hautes terres de la préfecture de Yamanashi. Une fois que vous aurez quitté l’autoroute Chuo, très fréquentée, et que vous vous dirigerez vers le nord en empruntant des routes plus calmes, ce seront les huit pics des monts Yatsugatake qui vous guideront et vous inviteront à poursuivre votre route.
Votre objectif est le village de Nagasawa. Vous saurez que vous êtes au bon endroit dès que vous apercevrez l’imposant minka (bâtiment traditionnel à ossature en bois) de 170 ans qui abrite le Terroir Ai To Ibukuro.
À l’intérieur comme à l’extérieur, la structure a été conservée pratiquement intacte, depuis ses poutres massives et ses lourdes tuiles en céramique jusqu’aux tatamis et aux décorations d’époque. À l’époque féodale, cette zone était une station postale sur la route de l’ancien Saku Koshu Kaido, une ramification de la route qui reliait Edo (l’ancien nom de Tokyo) à Kofu, la capitale de Yamanashi.
In fine weather, especially in winter, you can expect Mount Fuji’s iconic peak to be visible for at least half of the two-plus hours it takes to drive from Tokyo toward the uplands of Yamanashi Prefecture. Once you have turned off the busy Chuo Expressway and are heading north along quieter highways, it will be the eight peaks of the Yatsugatake Mountains that guide and beckon you on your way.
Your goal is the village of Nagasawa. And you’ll know you’re in exactly the right place as soon as you spot the imposing 170-year-old minka (traditional timber-framed building) that houses Terroir Ai To Ibukuro.
Inside and out, the structure has been preserved virtually intact, from its massive beams and heavy ceramic roof tiles down to the tatami mats and heirloom decorations. In feudal days, this area used to be a post station on the route of the ancient Saku Koshu Kaido, an offshoot of the highway that linked Edo (the former name for Tokyo) with Kofu, the capital of Yamanashi.
L’une des extrémités de cet impressionnant bâtiment, qui servait autrefois d’écurie pour les chevaux, a été cloisonnée, isolée et dotée de baies vitrées donnant sur un jardin verdoyant avec des herbes aromatiques et des ume (pruniers). Il s’agit de la salle à manger, mais le poêle à bois et le mobilier occidental vintage la rendent si chaleureuse et confortable que l’on pourrait croire qu’il s’agit du salon personnel du chef Shinsaku Suzuki.
One end of this impressive building, formerly used as a stable for horses, has been partitioned, insulated and fitted with picture windows looking out onto a verdant garden with herbs and ume (plum) trees. This is the dining room, although the wood stove and vintage Western furniture make it feel so warm and comfortable that you might think it was chef Shinsaku Suzuki’s personal living room.
Suzuki n’est pas originaire de ce coin septentrional de Yamanashi, mais il n’est pas non plus l’un des nombreux chefs qui ont quitté la métropole tokyoïte pour se rapprocher de la terre du Japon rural.
Né dans la petite ville d’Iida, dans le sud montagneux de la préfecture de Nagano, il s’est d’abord formé à la cuisine japonaise avant de changer de cap. Installé à Tokyo, il a travaillé sous la direction du chef Masahito Ueki, dont le restaurant innovant J a contribué à redéfinir la cuisine française dans ce pays à partir de la fin des années 1990.
En 2011, lorsque Suzuki et son épouse, Emi Ishida, ont ouvert leur premier restaurant dans le quartier Sangenjaya de Tokyo, ils l’ont baptisé Ai to Ibukuro (Amour et Estomac). Ce nom est tiré d’un proverbe souvent cité, généralement attribué à la Chine ancienne, mais aujourd’hui plus répandu en Europe : « Le chemin du cœur passe par le ventre ».
Suzuki is not a native of this northern corner of Yamanashi, but neither is he typical of the many chefs who have left the Tokyo metropolis to feel a closer connection to the soil of rural Japan.
He was born in the small city of Iida in the mountainous south of Nagano Prefecture and initially trained in Japanese cuisine before changing course. Moving to Tokyo, he worked under chef Masahito Ueki, whose innovative Restaurant J helped redefine French cuisine in this country from the late 1990s.
In 2011, when Suzuki and his wife, Emi Ishida, opened their first restaurant in Tokyo’s Sangenjaya district, they named it Ai to Ibukuro (Love and Stomach). The name is drawn from an oft-quoted proverb usually attributed to ancient China, though now more ubiquitous in Europe: « The way to the heart is through the belly. »
Le restaurant a bien marché et a servi de rampe de lancement idéale. Mais dès le départ, Suzuki et Ishida ont souhaité s’installer à la campagne. Après quatre ans de recherche, ils ont trouvé le local idéal. En 2017, ils ont franchi le pas, ajoutant le mot « terroir » au nom de leur restaurant pour souligner leur volonté de s’enraciner dans un nouvel environnement. Ils n’ont jamais regardé en arrière.
Pour Suzuki, vivre près des contreforts de Yatsugatake a été l’occasion d’approfondir sa connaissance des plantes sauvages comestibles et des champignons. Il a appris des techniques pour attraper des poissons d’eau douce. Il a même obtenu un permis de chasse au gibier et à la sauvagine. Mais surtout, Ishida et lui ont saisi l’occasion d’établir des relations étroites avec les agriculteurs et les artisans qui, comme eux, se sont installés dans cette région.
Aujourd’hui, ils ont établi des liens personnels étroits avec presque tous leurs producteurs, non seulement pour la nourriture et les boissons, mais aussi avec les potiers et les tourneurs de bois, les tisserands et les teinturiers qui fabriquent leurs serviettes de table ou qui fournissent le papier washi pour leurs menus. Ce sont ces personnes – énumérées et célébrées au dos du menu de Suzuki comme les « All Stars » d’Ai to Ibukuro – qui donnent au restaurant son caractère, sa saveur et son sens profond du terroir.
The restaurant did well and served as an ideal launching pad. But from the very start, Suzuki and Ishida had their eyes on settling in the countryside. After four years of searching, they found the perfect premises. In 2017, they made their move, adding the word « terroir » to their restaurant’s name to emphasize their desire to put down roots in new surroundings. They have never looked back.
For Suzuki, living close to the foothills of Yatsugatake offered an opportunity to deepen his knowledge of wild edible plants and mushrooms. He learned techniques for catching freshwater fish. He has even acquired a license to hunt wildfowl and game. More than that, though, he and Ishida have embraced the chance to establish close relationships with farmers and craftspeople who, like them, have settled in this area.
These days, they have established strong personal connections with just about all their producers — not only for food and beverages but also the potters and wood-turners, the weavers and dyers who make their table napkins or supply the washi paper for their menus. It is those individuals — listed and celebrated on the back of Suzuki’s menu as the Ai to Ibukuro « All Stars » — that give the restaurant its character, flavor and deep sense of terroir.
L’un des ingrédients qui revient régulièrement dans la cuisine raffinée et contemporaine de Suzuki est le jambon cru produit par un proche voisin, Prosciutteria Morimoto, qui utilise les cuisses de porcs élevés en plein air et dans des pâturages. Coupé en tranches fines, le prosciutto de 21 mois d’âge a une belle profondeur de goût qui confère un umami délicat aux plats de Suzuki.
L’iwana (omble d’eau douce) est depuis longtemps un pilier de l’alimentation dans les montagnes du Japon. Au lieu de suivre la tradition et de simplement griller le poisson, Suzuki plonge sa chair dans une savoureuse pâte à beignet relevée d’une bière artisanale locale et la fait frire jusqu’à ce qu’elle soit dorée, en la garnissant d’un généreux monticule de tranches de prosciutto pour en faire une superbe entrée.
One ingredient that features regularly in Suzuki’s polished, contemporary cuisine is cured ham produced by a close neighbor, Prosciutteria Morimoto, using the haunches of free-range, pasture-raised pigs. Sliced paper-thin, the 21-month-aged prosciutto has a lovely depth of flavor that lends a delicate umami to Suzuki’s dishes.
Iwana (freshwater char) have long been a mainstay of the diet in the mountains of Japan. Instead of following tradition and simply grilling the fish, Suzuki dunks their flesh into a savory beignet batter leavened with a local craft beer and deep-fries them golden-brown, topping them with a generous mound of the prosciutto slices to make a superb appetizer.
Un autre poisson dont Suzuki a fait un plat emblématique est le masu, une truite élevée dans l’eau claire de la source Yatsugatake à la ferme aquacole Kawazakana Miyama, située à proximité. Il fume légèrement les filets et les recouvre d’un enchevêtrement multicolore de betteraves râpées provenant de Crazy Farm. En dessous, vous trouverez des œufs de truite étincelants ainsi que de magnifiques touches de sauce au fromage de chèvre et des pousses de shiso (périlleux) provenant du jardin de Suzuki.
Pour ajouter à l’impression de lieu et de temps, il présente ce plat sur de vieilles tuiles que lui et Ishida ont découvertes empilées dans une réserve creusée dans la roche du flanc de la colline derrière la maison et qui datent probablement du milieu des années 1800, époque à laquelle le bâtiment a été érigé. Le résultat est spectaculaire – et le goût l’est tout autant.
En fait, il s’est avéré si populaire que Suzuki le sert désormais toute l’année, l’un des rares points fixes de ses menus en constante évolution.
Another fish that Suzuki has turned into a signature dish is masu — trout raised in clear Yatsugatake spring water at the nearby aquaculture farm Kawazakana Miyama. He lightly smokes the filets, covering them with a multicolored tangle of shredded beet from Crazy Farm. Hidden underneath, you will find gleaming trout roe along with gorgeous dabs of rich goat cheese sauce and shiso (perilla) sprouts from Suzuki’s own garden.
To add a further sense of place and time, he presents this dish on old roof tiles that he and Ishida discovered stacked up in a storeroom carved out of the rock in the hillside behind the house and which probably date back to the mid-1800s when the building was erected. The result looks spectacular — and tastes the same. In fact, it has proved so popular that Suzuki now serves it year-round, one of the few fixed points on his ever-changing menus.
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