œuvre graphique
Dans le silence feutré de notre quotidien saturé d’images et d’informations, certaines œuvres percent le vacarme en posant les bonnes questions avec peu de mots et beaucoup de justesse. Dans l’indifférence générale, la première bande dessinée de l’illustrateur Roberto Grossi, est de celles qui frappent fort, sans bruit, mais avec une intensité qui colle à la peau.

Ce roman graphique se présente comme un portrait acide et lucide d’une société anesthésiée, où le tragique est devenu banal et la violence quotidienne presque invisible. Avec un trait sobre, nerveux, et un noir et blanc sec comme un constat, Grossi questionne notre rapport au monde, à l’autre, à l’indifférence collective.


Dans une suite de scènes, de tableaux ou de pensées en fragments, Dans l’indifférence générale déplie le fil d’une conscience lucide face à l’absurdité du monde. Guerre, précarité, dérive politique, crise climatique, racisme ordinaire, algorithmes et écranisation des esprits : tout y est, mais jamais de façon pesante. Grossi ne moralise pas, il met à nu le réel, d’un trait presque clinique, laissant au lecteur le soin de ressentir, de réagir — ou pas.
Il y a dans cette BD l’esprit des grands pamphlets silencieux, quelque chose entre Tardi et Guy Debord, un regard sur la désillusion collective et la passivité comme symptôme de notre époque.


Le dessin de Roberto Grossi va à l’essentiel. Pas de surjeu, pas de couleurs criardes, pas d’effets. Juste le noir et le blanc, le trait tendu, les corps raides, les visages fermés. Une esthétique minimaliste qui épouse parfaitement la gravité du propos, tout en laissant circuler une certaine poésie du désespoir.
Car derrière la critique sociale, c’est bien une quête de sens et de lien humain que dessine Grossi. Une BD qui ne crie pas, mais chuchote fort.

Avec cette œuvre dense, ironique et profondément humaine, Roberto Grossi signe une entrée remarquée dans le monde de la bande dessinée contemporaine. Un livre qui ne se contente pas de raconter : il interpelle.








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