L’art de régner dans l’exil intérieur
Il est des titres qui claquent comme une énigme, et des romans qui se lisent comme un miroir. Une reine sans royaume, dernier opus de Hella Feki, appartient à cette race singulière de livres qui parlent d’un destin individuel mais résonnent comme une fable universelle. Car qu’est-ce qu’être reine sans royaume, sinon l’expérience de toute existence moderne : tenir sa couronne bien droite, même quand le trône se dérobe ?
Le récit met en scène une femme – souveraine déchue ou souveraine de soi-même – qui cherche, au fil des pages, à réconcilier la grandeur de ses rêves et la précarité du réel. Hella Feki écrit avec une précision sensuelle : phrases fines, ciselées, pleines de silences éloquents. Son héroïne se débat dans l’intime et le politique, l’amour et le pouvoir, l’orgueil et la solitude.
Une tragédie ? Plutôt une élégance mélancolique, à la manière d’une reine qui sourit encore, même privée de sceptre.
Ce qui séduit chez Hella Feki, c’est moins l’intrigue que l’art de la nuance. Elle réussit à faire de la fragilité un luxe, du désenchantement une posture. On y lit l’écho des grandes figures féminines de la littérature – de Marguerite Yourcenar à Assia Djebar – mais avec une plume contemporaine, incisive, résolument libre.
Une reine sans royaume est le roman d’un exil intérieur, mais aussi une célébration : celle de la souveraineté que l’on garde en soi, même quand tout empire s’effondre.
On referme le livre avec cette impression singulière : être, soi aussi, un roi ou une reine sans royaume. Mais avec panache.








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