Tarzan et le journal de Jane・

Tarzan et le journal de Jane・

L’adaptation de Tarzan et le Journal de Jane par Mike Royer est un parfait exemple de l’alchimie entre hommage et réinvention.

Mike Royer, déjà reconnu pour son travail avec des géants comme Jack Kirby et ses nombreuses collaborations dans l’univers du comic book, apporte à ce récit une dimension qui va au-delà de la simple retranscription d’une histoire : il en fait une expérience visuelle, presque émotionnelle.

Ce qui frappe immédiatement dans l’adaptation de Mike Royer, c’est son dessin, d’une précision presque architecturale, mais fluide et organique. Chaque case semble respirer la jungle et l’humain. Le trait est à la fois précis et vivant, jouant avec les ombres et les lumières de manière à créer une atmosphère aussi palpable que le souffle de la forêt.

Contrairement à certaines représentations plus « classiques » du héros sauvage, Mike Royer n’humanise pas Tarzan pour le rendre plus accessible. Au contraire, il accentue l’aspect primitif du personnage, le rendant tout à fait ancré dans l’univers naturel.

Ce Tarzan est une figure qui lutte avec ses instincts, ses désirs et ses peurs, tout en étant profondément marqué par son héritage civilisé – un tour de force graphique pour représenter l’ambiguïté du personnage.

Dans l’œuvre originale de Burroughs, la jungle est souvent traitée comme un décor, un cadre dans lequel l’histoire se déroule. Mais dans cette version de Mike Royer, la jungle devient presque un personnage à part entière. Ses contours se mélangent avec ceux des personnages, ses forces et ses dangers prennent une dimension presque sensorielle. Mike Royer, à travers ses jeux de lumière, de textures et d’ombres, donne vie à cette jungle : on y ressent la chaleur de l’air, la lourdeur de l’humidité, la densité de la végétation.

La jungle n’est pas seulement le décor de l’aventure, mais l’âme de l’histoire. Mike Royer, à travers son encre et sa manière de croquer l’environnement naturel, en fait un protagoniste silencieux qui façonne et modifie les personnages à chaque instant. Tarzan et Jane semblent fusionner avec cet environnement, comme s’ils en étaient des extensions vivantes.

L’ajout du Journal de Jane comme structure narrative est un autre coup de maître de Mike Royer. Le personnage de Jane, souvent relégué à un rôle secondaire dans de nombreuses adaptations de Tarzan, prend ici toute son importance. Le journal intime devient un espace de réflexion, une voix-off qui vient contraster la sauvagerie de l’instant avec la rationalité de la pensée humaine.

Mike Royer ne se contente pas de « raconter » l’histoire de Tarzan, il l’enrichit. Loin des simplifications souvent vues dans les adaptations, il creuse le mythe pour en extraire des nuances plus profondes. Ce n’est pas simplement une histoire d’un homme élevé par les singes, mais une métaphore de la condition humaine, de notre rapport à la nature, et à ce qui nous définit.

Mike Royer fait de chaque planche un miroir, non seulement du personnage de Tarzan, mais aussi de la place de l’homme dans l’univers. Cette approche fait écho à l’essence même de Burroughs, mais avec une touche plus méditative.

Editions Graph Zeppelin

 

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